1894.
Ce 4 mars 1894, Pierre HIVERT participe à l’exposition culinaire à l’hôtel de Bretagne, rue de Strasbourg à Nantes. Fabriquant de beurre et de fromage, il s’est fait petit à petit il s’est fait un nom dans le milieu de la gastronomie nantaise en participant à plusieurs salons.
En 1894, Pierre a désormais 39 ans et voilà plus de cinq ans qu’il a installé son activité de transformation laitière au village dénommé « Le Château » à Saint Julien. La famille qu’il a fondée avec Marie-Clémentine BIRY, a quitté en 1888, les îles de la Loire pour occuper l’orangerie du Gué au Voyer dont le château, propriété de la famille Damien de Chandenier, parti en flammes au moment de la révolution, il y a presque un siècle désormais.
La famille s’est vite agrandie et compte désormais sept enfants avec la naissance d’Adrien né il y a deux ans.

Cette année là, Pierre et Marie sont fiers de leur famille et du chemin parcouru depuis leur mariage en juin 1881 et leur installation sur l’île d’Arrouix… Le seul regret de Pierre c’est de ne pas avoir vraiment partagé cette réussite avec son père prénommé lui aussi Pierre, disparu il y plus d’un an en décembre 1892.
Même s’il ne regrette pas son choix d’être parti de l’ile d’Arrouix, Pierre se souvient avec un peu de nostalgie de la vie sur cette île de la Loire, une existence ponctuée par les traversées quotidiennes du fleuve, le hasard des récoltes, les crues, les glaces de l’hiver et les étés ensoleillés dans la fraîcheur des prés.
Avec son beau-père Auguste BIRY, Pierre a pu y développer un petit troupeau de vaches laitières. L’île est en effet propice à l’élevage avec ses prairies permanentes mais peu favorable aux cultures à l’exception de celle de l’osier. Mis à part du foin pour les bêtes, difficile de cultiver quoi que ce soit. Pierre a bien essayé d’emblaver une à deux parcelles de blé « mais ça noyait », et il a dû arrêter.
En 1886, cette île qui s’étend 115 hectares compte 24 habitants avec seulement deux corps de corps de ferme. La famille HIVERT-BIRY y vit un peu à l’étroit avec ses trois enfants, Eugène, Marie, Clémentine. D’autant que son beau-frère, Auguste vient également de se marier à Louise JOUBERT et a déjà un enfant. Avec quelques hectares et quelques vaches l’exploitation ainsi que la maison sont trop petites pour deux familles.

L’année suivante, Pierre rencontre un prêtre jurassien, ami du curé Prudent TORELLE, en villégiature à Saint Julien. Celui-ci l’initie à la fabrication de fromage et lui laisse quelques moules… Pierre trouve cette activité intéressante car le lait est produit en abondance dans les environs de St Julien mais n’est pas transformé. Concernant la concrétisation de ce projet Pierre se pose de multiples questions : « Difficile en effet de produire ce fromage sur l’ile et faire des traversées tous les jours pour livrer les clients… Pour affiner le fromage il faut pouvoir bénéficier d’un endroit frais et tempéré… »
Sa sœur Marie HIVERT, mariée à Clément MENARD et informée du projet de son frère lui propose alors de venir s’installer dans son village du Château et de pouvoir bénéficier ainsi des caves de l’ancienne maison seigneuriale du Gué au Voyer afin de concrétiser son projet de création de transformation laitière.
L’activité prend peu à peu son essor et le couple crée sur site une épicerie dès l’année suivante pour mieux écouler lait, beurres et fromages. Marie se charge de ce petit commerce.

Mais au début des années 1890, l’activité de transformation et de vente s’avère lourde à porter pour un couple seul. D’autant que la famille s’agrandit sans cesse avec les naissances successives d’Auguste de Pierre et de Louise.
Pierre propose alors à Louis CESBRON, son beau-frère et époux de Clémentine BIRY, sœur de Marie, alors forgeron de la Chapelle-Basse-Mer, de venir lui prêter main forte et de s’associer avec lui.


Ensemble les deux couples améliorent sans cesse les techniques de fabrication et d’affinage. Le fromage sera une pâte demi-cuite affinée pendant trois semaines dans les caves du château. Il s’appellera dans un premier temps « Régal des Gourmets ». Illustration tirée du site http://www.curenantais.com/fr/
Ce même fromage obtient donc son premier prix ce 4 mars 1894, lors de l’exposition culinaire de Nantes.

